Biodiversité en danger : quelle réponse économique ? L es indicateurs convergent sur le fait que la biodiver-sité s'effondre à l'échelle mondiale et que le phéno-mène s'accélère au cours de la période récente. Ce constat vaut aussi pour la France. Or, la biodiversité est le garant de biens et services irremplaçables, préservant la capacité de la nature à fournir nourriture, matières pre-mières, médicaments, à nous protéger contre les risques naturels, à stocker du carbone, recycler des déchets, et à contribuer à la qualité de notre cadre de vie. Les prin-cipaux moteurs de la perte de biodiversité sont désor-mais bien identifiés : en France l'artificialisation des sols, la fragmentation des milieux naturels, des pratiques agri-coles intensives, l'assèchement des zones humides sont des causes importantes. Face à des enjeux trop longtemps sous-estimés, les poli-tiques de préservation de la biodiversité ont des résultats décevants. Elles manquent de cohérence et s'appuient sur une protection trop fragmentée, souvent davantage centrée sur l'espèce ou l'animal que sur les écosystèmes. Cette Note montre que des leviers existent, pour mieux utiliser les budgets, pour faire gagner en cohérence et en ambition les réglementations, et, surtout, pour fournir des incitations efficaces à la protection. La vitesse de dégradation des écosystèmes ne laisse plus le temps de l'inaction. Nous recommandons de saisir l'oppor-tunité du plan de relance suite à la crise du Covid-19 pour investir dans des actions d'aménagement favorables à la biodiversité. Il faut aussi développer une stratégie natio-nale plus unifiée et déclinée aux différents échelons terri-toriaux en articulant plus efficacement les missions de l'Office français de la biodiversité (OFB), des structures régionales et des intercommunalités. En parallèle, nous proposons de mobiliser une panoplie renouvelée d'instruments inspirés par une démarche éco-nomique permettant de prendre en compte les externalités positives de la biodiversité. Ainsi, nous recommandons une réforme de la séquence « éviter, réduire, compenser » actuellement en vigueur dans les grands projets d'amé-nagement, et un accès plus conditionnel aux subventions publiques. Les dispositifs fiscaux doivent être revus pour réduire les incitations à l'artificialisation des sols, due notamment à une excessive imposition des espaces non bâtis par rapport à leur valeur d'usage et à la non-prise en compte du coût de l'artificialisation dans les projets d'amé-nagement. Les aides agricoles doivent être réorientées vers des contrats de conservation rémunérateurs, visant un engagement de long terme en faveur de la biodiversité. Concernant les échanges extérieurs, nous recommandons de renforcer les inspections relatives au tourisme et au commerce pour limiter l'importation d'espèces inva-sives et de pathogènes, de rendre plus opérationnelles les clauses environnementales liées à la biodiversité des accords commerciaux préférentiels et d'encourager à des politiques coordonnées. Mais pour éviter que des actions en faveur de la biodiversité ne déplacent le problème à l'étranger, l'ensemble des mesures prises au niveau local doit s'intégrer dans un cadre global d'une modification des modes de consommation, en particulier de produits animaux, et de réduction des gaspillages. a Conseil économique pour le développement durable, correspondant du CAE ; b AgroParisTech, Université Paris-Saclay ; c École d'économie de Paris (PSE), Université Paris I Panthéon-Sorbonne, membre du CAE. Les notes du conseil d'analyse économique, n° 59, Septembre 2020
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Bureau, D., Bureau, J.-C., & Schubert, K. (2020). Biodiversité en danger : quelle réponse économique ? Notes Du Conseil d’analyse Économique, n° 59(5), 1–12. https://doi.org/10.3917/ncae.059.0001
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