Le positivisme sociologique : l'itinéraire de Léon Duguit

Abstract

L'intérêt renouvelé de la recherche juridique pour l'histoire de la doctrine, la célébration récente du 150 e anniversaire de la naissance de Léon Duguit 1 , ne pouvaient que relancer l'attention sur les travaux du professeur de Bordeaux. De manière originale, il s'agit cette fois de placer son itinéraire dans la nébuleuse du positivisme et de la sociologie. Il est vrai que le juriste présente pour particularité d'avoir accepté de penser de front les transformations sociales à l'aide de nouveaux concepts et avec l'utilisation des apports récents de la sociologie. Ses modélisations doctrinales s'éloignent du coup des fondements établis de la discipline constitutionnelle de son temps. Mais si des rapprochements intellectuels peuvent s'opérer avec les travaux d'Auguste Comte ou d'Emile Durkheim, la prudence doit dominer en matière d'attribution de parenté. Plutôt que d'évoquer le terme d'influence, on lui préférera celui de réception qui restitue avec plus de justesse la réalité du circuit intellectuel à l'oeuvre entre ces auteurs. Le « récepteur » (L. Duguit) y joue le rôle d'un interprète produisant les travaux de l'« émetteur » plus qu'il ne les reproduit 2. Loin d'une reprise fidèle, les leçons des premiers « maîtres » de la sociologie interviendront donc davantage pour servir sa propre démonstration. Chez Duguit, le ressort essentiel de son engagement universitaire était de faire du droit autrement. Un an avant sa mort, 1 Voir F. Melleray (dir.), Autour de Léon Duguit. Colloque commémoratif du 150 e anniversaire de la naissance du doyen Léon Duguit, Bordeaux, 29-30 mai 2009, Bruylant, coll. Mélanges, 2011; également S. PINON, « Léon Duguit face à la doctrine constitutionnelle naissante », R.D.P., n° 2-2010, pp. 523-548. 2 Voir H.-G. GADAMER, Vérité et méthode. Les grandes lignes d'une herméneutique philosophique, Ed. du Seuil, 1996, p. 317.