Il est nettement abusif de parler de « pacte fiscal » pour désigner l'entente « financière et fiscale » qui a été conclue en juin 2000 entre le gouvernement du Québec et les unions municipales ; il serait plus juste de parler d'armistice, de celles qui se signent entre un vainqueur et des vaincus. En fait, ce nouvel épisode, assez banal en somme, s'inscrit parfaitement dans la série monotone des réformes, ou plutôt des retouches successives qui, d'aussi loin qu'on puisse remonter, ont eu pour effet d'écorner systématiquement la panoplie fiscale des municipalités, en leur retirant un à un la plupart des outils fiscaux qu'elles avaient parfois développés d'elles-mêmes, pour les confiner graduellement à l'impôt foncier, à très peu de choses près. La raison du plus fort est toujours la meilleure : Nous l'allons montrer tout à l'heure. (Jean de La Fontaine)* Les municipalités québécoises ne sont pas contraintes dans un rapport de forces exceptionnel puisque les gouver-nements locaux sont partout soumis à des gouvernements nationaux généralement assez jaloux de leur pouvoir 2. « Lever l'impôt-comme battre monnaie-est une prérogative de puissance publique, sinon de souve-raineté. Cette donnée fondamentale explique dans une large mesure [se référant aux finances publiques locales des pays européens] : • le rôle exclusif de l'État dans la détermination des redevables, de la nature et de la valeur des assiettes ; • le rôle de l'État dans l'encadrement des possibi-lités offertes aux collectivités, pour fixer les taux ; • le caractère strictement réglementé de la participation des collectivités aux recettes de l'État, par voie de partage » 3. Et jusqu'à maintenant du moins, le discours en vogue, sur le nouveau rôle des villes dans un monde globalisé ou sur les réseaux de villes de niveau mondial, ne s'est pas traduit par des réaménagements fiscaux conséquents. À cet égard, il est clair que la relative souveraineté des provinces canadiennes, et singulièrement celle du Québec, est directement menacée par le combat pour une plus grande marge de manoeuvre fiscale, amorcé par certains au nom des grandes villes canadiennes, discours puissam-ment relayé par des porte-parole « marqués » comme la banque Toronto-Dominion 4. On a beau l'analyser avec la meilleure des bonnes volontés, il n'en demeure pas moins que l'entente de juin 2000 ne procède qu'à des réaménagements mineurs, sur lesquels nous reviendrons plus abondamment par la suite. Mais déjà, en s'en tenant aux grandes lignes, on constate que les montants en cause sont relativement peu importants. En fait, on donne d'un côté ce que l'on prend de l'autre et, globalement, les municipalités y perdent au change : l'entente redonne un peu moins que ce qui avait été pris aux municipalités dans le cadre de la lutte pour * « Le Loup et l'agneau » de La Fontaine, Jean (1668), Fables, livre n o 1, fable n o 10, http://www.lafontaine.net/menu.htm On donne d'un côté ce que l'on prend de l'autre et, globalement, les municipalités y perdent au change : l'entente redonne un peu moins que ce qui avait été pris aux municipalités dans le cadre de la lutte pour l'atteinte du « déficit zéro ».
CITATION STYLE
Hamel, P. J. (2002). Le « Pacte fiscal » entre le gouvernement du Québec et les municipalités : la raison du plus fort est toujours la meilleure. Revue Organisations & Territoires, 11(3), 31–38. https://doi.org/10.1522/revueot.v11n3.787
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