La coexistence entre autochtones, allochtones, immigrés correspond à l’ordinaire, au quotidien de la vie urbaine ou rurale mais quand elle fait irruption sur la scène politico-médiatique, elle peut revêtir la forme du drame social. En Côte d’Ivoire, si la question de l’immigration n’est pas nouvelle, son instrumentalisation politique est récente ; elle n’a jamais cessé d’alimenter le débat public sans jamais pour autant déboucher sur une véritable politique d’immigration et de restructuration de la communauté nationale. Après avoir adopté pendant plus de trois décennies une attitude très libérale en matière d’immigration, donnant « droit » aux immigrants d’accéder à la terre, à des emplois publics et de participer aux différentes élections, le gouvernement ivoirien a notablement révisé ses dispositions réglementaires, réformant le système au profit des « Ivoiriens de souche ». Dans ce climat particulièrement tendu et de stigmatisation de l’Autre, les « frères » d’Afrique de l’Ouest découvrent leur étrangeté. Devenus les étrangers voire les ennemis de la Côte d’Ivoire, ils sont conduits à contester, accepter ou se réapproprier ces nouvelles assignations. Naturalisation, assimilation au majoritaire, repli sur soi, reconfiguration de ses relations de voisinage et de travail, revalorisation de sa singularité, semblent autant de postures déclinées, tour à tour, par les ressortissants africains installés en Côte d’Ivoire pour affronter l’exclusion.
CITATION STYLE
Bredeloup, S. (2003). La Côte d’Ivoire ou l’étrange destin de l’étranger. Revue Européenne Des Migrations Internationales, 19(2), 85–113. https://doi.org/10.4000/remi.461
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