Lorsqu’on se demande si la règle à laquelle obéit, par exemple, la continuation d’une suite de nombres comme 2,4,6,8, ... a été ou non suivie correctement dans un cas particulier, il est naturel de répondre qu’elle l’a été si et seulement si on a fait « la même chose »que depuis le début. Mais Wittgenstein souligne que les deux concepts « faire la même chose » et « appliquer correctement la règle » sont imbriqués l’un dans l’autre d’une manière telle que cette réponse ne nous est d’aucun secours. Quelqu’un pourrait continuer de façon déviante et soutenir néanmoins qu’il a bel et bien fait la même chose qu’auparavant. C’est cette situation qui est à l’origine du « paradoxe sceptique » qui a été discuté par Kripke. Un aspect important de la solution de Wittgenstein consiste à faire remarquer que, même dans le cas des règles mathématiques, le contenu de la règle n’est ni plus ni moins déterminé que ne l’est la pratique qui consiste à appliquer la règle. Or, le sceptique raisonne sur ce point comme si le contenu de la règle, aussi déterminé qu’il puisse être, pouvait néanmoins toujours laisser subsister une indétermination partielle et même peut-être complète dans la façon de l’appliquer. Ce que veut dire Wittgenstein semble être, justement, que la règle ne possède pas, par rapport à la pratique de l’application, le genre d’indépendance et de distance qui pourrait donner lieu à la formulation d’un authentique problème sceptique.
CITATION STYLE
Bouveresse, J. (2001). Que veut dire « Faire la même chose » ? Archives de Philosophie, Tome 64(3), 479–503. https://doi.org/10.3917/aphi.643.0479
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