Justices : Entre les impossibilités et la sagesse tragique

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Pouvoir ne pas parler n’est pas identique à ne pas pouvoir parler. Ceci est une privation, cela est une négation (Lyotard 1983 : 26). 1 La justice est justement ce qui, actuellement, se veut le baromètre et des privations et des négations de parole dans un monde où la force parodie la justice et le droit. Défi nitions, buts, extensions, acteurs, cadres, rendez-vous honorés ou manqués, paroles audibles ou suffoquées, secours des cultures ou fossoyeurs de celles-ci, recours des plus faibles et instrument des plus puissants, vengeance et pardon, endettement et rétribution, impératif divin et exigence humaine, parole humaine et cri inhumain, la justice qui incarne toutes ces postures pose l’une des plus grandes diffi cultés à la compréhension de notre humaine condition. Comment la penser aujourd’hui sans en référer à plusieurs figures et hésitations ? La question de la justice se pose souvent comme le lieu de la manifestation de la puissance et de l’autorité de l’État, mais cet État qui fut et qui se décline en certains endroits comme État/Nation est aujourd’hui mis à mal par la fluidité des mouvements des populations et la globalisation des échanges culturels. La justice, qu’elle soit interne aux États, ou qu’elle s’occupe des rapports entre les États, qu’elle soit même ce qui sonde la règle et ses modalités d’application, qu’elle s’occupe des problèmes de légitimité ou de ceux de la technologie ou de la commercialisation, qu’elle se place comme un complément à la coutume ou un pendant à la théologie, qu’elle s’essouffl e devant l’impossibilité de départager le règne de la force et du droit, qu’elle crie victoire après la punition des génocidaires, qu’elle hésite entre vérité, paix, devoir, égalité et équité, la justice—comme sentiment et comme institution—dit d’abord et avant tout le rapport des hommes à leur commune humanité qui regarde à la fois ses références fondatrices, ses bricolages sociaux quotidiens et l’avenir. La justice est ainsi comme le veut Proudhon à la fois en l’homme 2 et dans la nature. Le problème que nous nous proposons de poser ici est celui du lien. La question de la justice dans un monde qui se veut sécularisé—et qui se bat encore avec le retour en force des fondamentalismes raciaux, ethniques et religieux—nous conduit, dans le cadre de l’Afrique, à sonder, à travers trois types de défi s, l’application de la justice. D’une part, le défi de la prise en charge de la justice par les média (II. Mise en scène), et d’autre part, la question de la crédibilité de la Justice dans un monde travaillé par la méfi ance et le cynisme (III. Mise en confiance), et enfi n les différents noeuds autour de la justice pénale internationale ou la question de la propriété de la terre (IV. Mises à mort symboliques). Ces trois mises en conduisent vers l’esquisse d’une sagesse pratique (Ricoeur) qui n’est autre, dans le cas de l’Afrique, qu’une sagesse tragique non défaitiste.

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Bidima, J. G. (2015). Justices : Entre les impossibilités et la sagesse tragique. In Philosophy of Justice (pp. 369–383). Springer Netherlands. https://doi.org/10.1007/978-94-017-9175-5_22

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