Le concept d’idéologie appartient à cette classe de concepts de la théo- rie sociale qui sont tellement chargés que leur seule évocation suffit à éveiller les soupçons. On ne compte plus les commentaires sur ce concept, et il est vain de vouloir entreprendre un inventaire de ses redéfinitions et de ses diverses élaborations. Issu d’un héritage critique, il a été – et conti- nue d’être – au centre de conflits théoriques et d’enjeux politiques. Il est difficile de voir clair dans la masse des analyses qui, depuis plusieurs décen- nies, ont, d’un côté, annoncé la « fin de l’idéologie » et la désuétude du concept1 et, de l’autre, cherché à défendre le concept, proclamant la per- manence de l’idéologie, voire parfois son « retour »2 . Prenant acte de ces allées et venues, le présent texte s’attache à montrer que l’évolution la plus marquante dans la théorie sociale réside, non pas dans la « fin » ou le « retour » de l’idéologie, mais dans la redéfinition du concept qui, non seu- lement l’a considérablement éloigné de son acception marxiste mais, sur- tout, l’a dépouillé de son aiguillon critique. Loin d’assister à une dispari- tion du concept d’idéologie dans la théorie sociale, le phénomène majeur semble donc être sa reformulation dans un sens acritique.
CITATION STYLE
Voirol, O. (2008). Idéologie : concept culturaliste et concept critique. Actuel Marx, n° 43(1), 62–78. https://doi.org/10.3917/amx.043.0062
Mendeley helps you to discover research relevant for your work.